Publication pédagogique : Face aux difficultés des élèves en Français
L’ouvrage est co-dirigé par François Barié, IEN-ET de Lettres-Histoire de l’académie de Limoges et Olivier Massé, IA-IPR de l’Académie de Bordeaux : le souci d’aborder les difficultés des élèves en Français dans la continuité de leurs apprentissages, du collège au lycée professionnel, est affirmé d’entrée.
Un cadrage didactique
Une première partie de l’ouvrage est ainsi dévolue à un « cadrage didactique » qui fait le point sur le temps du collège et le temps du LP. Après avoir rappelé les chiffres inquiétants concernant les élèves en grande difficulté de lecture qui sont corroborés par toutes les enquêtes internationales et les tests du BSN, les auteurs expliquent résolument qu’une partie des réponses se trouvent dans les programmes plutôt que dans de multiples expériences ponctuelles qui, si elles ont une indéniable utilité, se caractérisent par le morcellement. Forts de ce constat, les auteurs soulignent l’intérêt du socle qui invite à un renversement pédagogique en partant de « ce que l’élève sait, de ce qu’il sait faire, de ses acquis ». Comme l’explique dans sa préface Anne Armand, Inspectrice Générale de Lettres, il s’agit de « s’interroger sur l’élève (en difficulté) et pas seulement sur les difficultés de l’élève. » L’ouvrage propose ainsi un point fort éclairante sur ce qui différencie les difficultés d’élèves, les élèves difficiles et les élèves en situation difficiles. Si le professeur ne peut agir sur tous les aspects (nombre des difficultés des élèves sont externes au domaine scolaire), il doit cependant avoir une représentation complète des diverses difficultés pour concentrer son action sur celles qui relèvent de la classe.
Des séquences pédagogiques incarnées
La deuxième partie de l’ouvrage se compose de six séquences pédagogiques marquées par le souci de prendre en compte l’élève. Plutôt que des fiches-recettes destinées à des élèves types dans lesquels aucun enseignant ne se reconnait, les six professeurs ayant apporté leur contribution à l’ouvrage relatent des séquences testées en classe. Pour chaque séquence sont présentés le contexte dans le lequel elle a été menée, la justification du projet, son déroulement précis et son analyse distanciée. Une première séquence réfléchit sur l’exploitation du positionnement-diagnostic. Cette pratique s’est généralisée dans nos établissements avec l’accompagnement personnalisé. On commence habituellement par effectuer un test permettant de mesurer les compétences de l’élève en Français afin de lui proposer un accompagnement efficient. Ces tests posent de nombreuses questions : évalue-t-on réellement des compétences en Français quand on fait remplir un QCM portant sur l’orthographe et la syntaxe ? Comment exploiter ces tests ? La démarche proposée par le professeur apporte des éléments de réponse en distinguant finement les profils d’élèves et en intégrant dans le positionnement l’utilisation de documents issus du monde professionnel que découvre l’élève.
Un atelier de négociation orthographique – la séquence 2 – prouve que les élèves peuvent se passionner pour l’orthographe en échangeant collectivement sur les raisonnements permettant d’appliquer les règles. Une attention particulière est également accordée à l’écriture – « L’écriture comme aide à l’expression de soi » (séquence 4) – à travers un projet qui laisse toute la place aux textes littéraires et à leur lecture orale par l’enseignant - essentielle - afin de nourrir l’écriture d’un texte autobiographique.
Une appropriation des nouveaux programmes de CAP et de BAC PRO
Trois séquences concernent encore plus particulièrement les lycées professionnels et apparaissent comme d’intéressants exemples de mise en œuvre des nouveaux programmes. La remarquable séquence 6 « Rendre les élèves décodeurs d’images et de textes en Bac Pro : allers-retours dans les œuvres » est référée à l’objet d’étude « Parcours de Personnages » autour de la problématique « Qu’est-ce qui fait de Batman un héros romantique ? ». Cette seule question suggère l’inventivité du corpus qui associe Christopher Nolan, Victor Hugo, Pierre Corneille et Alfred de Musset. Il s’agit bien de faire comprendre à l’élève comment la réflexion peut se nourrir de toutes les productions culturelles, qu’elles soient d’aujourd’hui ou d’hier. Cette séquence à dominante écriture (une écriture longue) montre comment la lecture nourrit l’écriture et inversement.
Une autre séquence autour de la parole au théâtre s’attache au travail autour de la compétence à entrer dans l’échange oral à travers la lecture des Boulingrin de Courteline. Une dernière séquence – les débats interprétatifs pour former des lecteurs avertis – montre comment des élèves en grande difficulté peuvent se livrer à une riche lecture d’un conte de Jean-Pierre Chabrol en s’enrichissant des hypothèses des uns et des autres.
Tout enseignant trouvera dans ces séquences, qui ne masquent pas la réalité du travail en classe avec ses satisfactions et ses interrogations, matière à nourrir sa réflexion.
Face aux difficultés des élèves en Français. SCEREN, 2012. 14 euros
Accéder à la bibliothèque du SCEREN